Visiblement, la perspective d'évoluer en France inspire les Autrichiens. La dernière fois qu'ils avaient participé à une phase finale d'une compétition majeure, c'était déjà dans l'Hexagone lors de la Coupe du Monde 98. Depuis, il faut bien l'avouer, on les avait quelque peu perdu de nos radars. On les avait bien retrouvés lors de l'Euro 2008 qu'ils avaient co-organisé avec la Suisse. Mais leur prestation sans saveur les avait logiquement conduit à la sortie dès la phase de groupes terminée. C'est dire si leur parcours en éliminatoires a surpris. Car voilà, l'Autriche s'avance comme l'outsider numéro un derrière les favoris. Un statut que ses dernières prestations lui ont conféré.
Pourtant à y regarder de plus près, les signes annonciateurs d'un renouveau ne manquaient pas. A commencer par l'arrivée à maturité de ses meilleurs éléments qui avaient, pour la plupart, atteint la demi-finale du mondial U20 en 2007. A l'image du couteau suisse David Alaba (Bayern Munich), du fantasque Marko Arnautovic (Stoke City) et du géant Marc Janko (FC Bâle). Suivi par la prometteuse et quelque peu frustrante campagne qualificative pour le Mondial au Brésil. A la lutte pour la deuxième place avec la Suède dans un groupe dominé par le voisin allemand, l'Autriche va disputer à Stockholm un match couperet lors de l'avant-dernière journée.
La formation de Marcel Koller entrevoit la qualification pour les barrages alors qu'elle fait jeu égal avec les Suèdois. Il ne reste qu'une poignée de minutes à disputer, et le score de parité fait clairement ses affaires alors qu'Ibrahimovic et les siens doivent affronter la Mannschaft en clôture. Oui mais voilà, ce diable de Zlatan sort une nouvelle fois de sa boîte pour donner la victoire à son pays à la 87e minute… Anéantissant les espoirs autrichiens d'un été brésilien. De cet « désillusion », Koller et ses hommes en sortent grandis. Ravalant leur frustration, ils se font la promesse de ne plus revivre pareille mésaventure. Un groupe était né. Ses performances crédibilisaient également le travail de son entraîneur principal.
La fédération, qui avait mal vécu la non participation à l'Euro, lui avait confié, contre toute attente, les destinés de la sélection en 2011. Les sceptiques étaient alors nombreux à maugréer leur incompréhension. Son CV affichait, il est vrai, un trou de deux ans. Au chômage depuis son renvoi de Bochum en 2009, il n'avait trouvé le confiance d'aucune équipe dirigeante ou de challenge suffisamment intéressant pour lui faire reprendre du service. A l'inverse, celui qui a passé l'intégralité de sa carrière professionnelle en Suisse, avait préféré affiner ses méthodes d'entraînement en effectuant plusieurs stages dans des clubs allemands et italiens.
Des mois d'auto-réflexion et d'introspection qui ont fait quelque peu évoluer sa philosophie de jeu, souvent jugée frileuse outre-Rhin. Une critique dont pourrait aussi parfois souffrir l'Autriche. Mais voilà, si elle laisse volontiers la possession à son adversaire, à la manière du Leicester de Ranieri, ce n'est que pour mieux l'aspirer et le contrer. Le capitaine, Christian Fuchs, récent champion d'Angleterre avec les Foxes ne connaît que trop bien les vertus de ce système. Et ne voudrait certainement pour rien changer ce dispositif tactique (4-2-3-1). D'autant qu'il symbolise à la perfection, cette faculté, dès la récupération du ballon, à rapidement se projeter.
Car qu'on se le dise, le couloir gauche autrichien a des allures de dynamite. Harcelant systématiquement, David Alaba sait se convertir en relayeur et combiner avec Arnautovic ou Fuchs pour servir l'avant-centre Janko (7 buts) ou profiter des espaces pour lui-même conclure (4 buts). Résultat, il a explosé tous les oppositions. Ou presque. Seule la Russie lui a résisté lors de l'une de leurs deux confrontations. A l'exception de ce résultat nul, l'Autriche a ainsi enregistré neuf victoires. En profitant même pour définitivement tourner la page suédoise. Sans doute significatif de leur progrès individuel et collectif, ils sont allés à Stockholm régler quelques comptes. Leur vengeance fut terrible. Elle a balayé des Suédois complètement dépassés (1-4). A l'Euro, ce sentiment pourrait être bien partagé par d'autres.
JULIEN ROUX
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