Le Parcours :

C'est une rengaine qui s'accroche désespérément à chacun des pays hôtes. On ne sait jamais vraiment où les situer dans la hiérarchie mondiale du moment. Durant deux ans ou presque, ils sont confinés à disputer des matchs amicaux sans saveur et sans indication aucune (on n'exagère peut-être) sur leur futur. Cependant, il est vrai que les Bleus ont, cette fois, pu se jauger et essayer plusieurs options face à des adversaires européens. L'UEFA plaçant la France dans un groupe de qualifications afin de lui permettre d'évoluer face à des équipes du Vieux Continent. Il n'empêche. Assurer de disputer l'Euro n'est donc pas une garantie de succès. Ça se saurait… quoique…

Si on s'en réfère à l'historique des Bleus lors des compétitions majeures dans l'Hexagone, les chances d'une fin en apothéose prennent assez vite des couleurs radieuses. Un destin similaire à celui des Tricolores version 84 et 98 est donc du domaine du possible. Son potentiel offensif, bien que profondément ébranlé par l'absence de son atout numéro 1, Karim Benzema, est une promesse à l'horizon infini seulement terni par une organisation défensive à l'inconnu décidément bien encombrante (les matchs amicaux du printemps face aux Pays-Bas et la Russie l'ont rappelé). Autant que les ennuis judiciaires de son sélectionneur et que le contrôle anti-dopage négatif subi par Mamadou Sakho. Bref, on a connu des préparations un brin plus calmes. En 1998 aussi, l'atmosphère autour des Bleus n'inspirait pas non plus à un optimisme béat...

Le Sélectionneur : Didier Deschamps

Gagner à domicile, Deschamps sait faire. Capitaine en 98, il sait tout des yeux dans les Bleus et des punchlines made in Forez de Jacquet. Pas sûr que cela soit suffisant cependant. Reste qu'il peut s'appuyer sur une formation à la palette offensive à faire pâlir n'importe quelle arrière garde. En se dotant d'un groupe jeune et défini depuis longtemps (à quelques exceptions notables près, Kanté et Payet), il a voulu se préserver des querelles intestines potentielles entre titulaires et remplaçants (les absences de Ribéry, Nasri voire Ben Arfa en témoignent). Et de celle à raisonnement autrement plus moral et national en renonçant à Benzema. Une façon comme une autre finalement de filer l'héritage transmis par Jacquet.

On se souvient ainsi que ce dernier s'était délibérément privé de Cantona et Ginola à l'Euro 96 ou avait retenu Dugarry, complice de Zidane hors du terrain, en 98 pour des raisons qui dépassaient largement le cadre du terrain. La même philosophie l'a animé lorsqu'il a façonné son projet de jeu, validé par l'automne ukrainien compostant un voyage au Brésil. Le Mondial 2014 s'est donc alors mué en une modélisation grandeur nature de ses lignes directrices. Comme pour mieux les éprouver à l'échelle d'une compétition internationale, lui qui savait qu'une longue succession de matchs amicaux attendaient ses joueurs. S'appuyer sur un axe Lloris – Varane – Pogba – (Benzema) dans un 4-3-3 à l'équilibre parfois vacillant devenait donc son credo.

La Star : Paul Pogba

La question de son talent avec un grand T ne se pose pas. La question de sa gestion difficile ne se pose plus. Celle de son avenir – autant que de sa prochaine coupe - n'est, elle, pas encore tranchée. Voilà pourquoi l'Euro est la compétition de tous les dangers pour Paul Pogba. Unanimement considéré comme le joueur européen le plus doué et bankable de sa génération, il va devoir composer avec la pression et l'attente de tout un peuple.

Pas facile pour un garçon âgé seulement de 22 ans et qui n'a jamais joué en pro dans son pays natal. S'il a fait preuve de caractère dans un passé pas si lointain en tenant tête à Sir Alex Ferguson quand celui-ci ne l'utilisait qu'avec parcimonie à Man United ou en s'imposant au sein d'une Vieille Dame connue parfois pour son conservatisme et son goût peu prononcé pour l'extravagance, il devra faire abstraction des tractations autour de son avenir pour donner la pleine mesure de ses qualités hors norme.

Car voilà, si l'inconnu de son prochain club se pose encore au début de la compétition, le risque de s'éparpiller est bien réel. Entre coups de téléphone à répétition et contrats à huit chiffres mirobolants, il lui sera alors bien de faire le vide dans sa tête pour enfin devenir ce milieu box to box façon Vieira indispensable à l'équilibre des Bleus. De son rayonnement dépendra pour beaucoup de la capacité de l'équipe de France à imposer son plan de jeu et à briller.

JULIEN ROUX

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