On pourrait aisément avancer que l'Irlande du Nord ne doit sa participation à l'Euro qu’à la refonte de la phase finale incluant désormais 24 nations. Mais aussi surprenant que cela puisse paraître, si le système n'avait pas évolué d’un iota, l'équipe de Michael O'Neill se serait quand même qualifiée. En effet, elle a terminé en tête du groupe F avec un point d'avance sur la Roumanie, profitant à plein d’une poule dont le cador présumé, la Grèce, avait des allures de puissance d’un autre temps.

Il n’empêche. La voir s’asseoir à la table des grands demeure une surprise pour une nation de moins de deux millions d’habitants qui n’avaient jusque-là connue qu’un seul fait d’arme majeur avec une participation à la Coupe du Monde 1986. Sa précédente campagne qualificative pour le Mondial brésilien, achevée à la cinquième place avait bien laissé entrevoir des progrès sensibles, mais pas grand-chose ne laissait présager d’un tel dénouement.

La GAWA (Green and White Army) était pourtant bel et bien née. Sa victoire face à la Russie et le nul arraché au Portugal étaient en réalité les premières concrétisations d’un travail de fond entrepris par la fédération bien des années plus tôt. O’Neill, au moment de son intronisation en décembre 2011 à la place de Nigel Washington, avait insisté sur la patience et la nécessité d’un travail sur le long terme. Peu cependant le croyaient alors capable d’incarner ce projet.

Son CV ne mentionnait que deux expériences sans relief à Brechin City et Shamrock Rovers quand son passé de joueur ne laissait que le vague souvenir d’un milieu de terrain international besogneux. Cela ne l’a cependant pas empêché de progressivement former un groupe solide, à la discipline collective éprouvée et doté d’une qualité technique pas franchement partagée par les autres nations mineures présentes en France.

La paire de défenseurs centraux, Jonny Evans et Gareth McAuley, associée au milieu de Southampton, Steven Davis, dont l’influence est bien souvent sous-estimée sont les symboles d’une formation que personne n’attendait à pareille fête. A l’instar de son héros inattendu, Kyle Lafferty. Aussi peu utilisé que prolifique à Norwich, il semble métamorphosé une fois la tunique nationale enfilée.

En dépit du manque criant de créativité en phase offensive de ses coéquipiers, il a fait preuve d’une adresse à faire pâlir bien des attaquants dont la renommée traverse les frontières de leur pays. Avec sept buts, dont deux cruciaux face à la Hongrie (l’un pour arracher la victoire à Budapest l’autre pour glaner un point au bout du temps additionnel), il a matérialisé le rêve éveillé de ses compatriotes. Difficile pourtant de l’imaginer en mesure de réitérer pareil exploit à l’Euro…

JULIEN ROUX

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