Fatih Terim et la sélection turque, c’est un remake de je t’aime moi non plus. Une sorte de love story fusionnel qui a besoin de faire un break de temps à autre pour mieux s’enflammer par la suite. Ce feu s’écrit des lettres Euro. A la vue de leur courbe généreuse, l’Empereur ne semble pouvoir résister au charme qu’elles exercent sur lui. Sa fédération, consciente de sa faiblesse, sait ainsi se montrer pressante le moment venu en réitérant les appels du pied. Le premier, en 1993, le place en pleine lumière. Après trois années passées dans l’ombre du numéro un, il troque son costume d’assistant pour enfiler celui de sélectionneur.
Il guide alors les siens à l’Euro 1996. Un exploit XXL pour une nation qui n’avait encore jamais atteint la phase finale d’une compétition majeure. Pourtant, au terme d’un parcours insipide en poules (3 défaites et aucun but marqué), Terim quitte la sélection pour s’engager avec Galatasaray. La séparation dure neuf ans avant que leurs routes ne se croisent de nouveau. Une fois encore, l’Euro joue les facilitateurs. Alors qu’il reste trois journées à disputer lors des éliminatoires de la Coupe du Monde 2006, Terim a déjà en tête la perspective de s’envoler pour l’Autriche et la Suisse à l’été 2008.
Une formation helvétique qui le prive cependant du Mondial en Allemagne à la suite d’une défaite en barrages. La déception évacuée, lui et ses hommes se remobilisent pour valider leur participation à l’Euro 2008. Pour ce qui reste, aujourd’hui encore, comme leur plus beau en parcours sur la scène continentale. Eliminés en demi-finale par l’Allemagne, les Turques ont toutefois emballé le cœur du public par leur capacité à puiser dans leurs ressources mentales pour retourner des situations bien compromises. Face à celle inéluctable d’une nouvelle non-participation à la Coupe du Monde 2010, Terim présente néanmoins sa démission quelque mois plus tard.
Le divorce consommé, il s’engage de nouveau avec Galatasaray. Mais il était dit que leur relation ne pouvait se terminer ainsi. Moins de trois ans plus tard et alors que la Turquie dispose toujours de la possibilité de composter son billet pour le Mondial 2014, la fédération lui fait de nouveau les yeux doux pour une mission commando de quatre matchs. L’intérim se prolonge finalement après que le club stambouliote, excédé par le double emploi du temps de son entraîneur, le renvoie. Si Terim ne parvient toujours pas à emmener sa formation au Mondial, il la qualifie pour l’Euro français en décrochant la place de meilleur troisième.
L’affaire était pourtant bien mal engagée. Avec seulement un point pris après trois journées, ses tâtonnements managériaux se matérialisaient sur le plan comptable… A la recherche de la bonne formule, Terim a longtemps expérimenté. Résultat, la Turquie ressemblait alors à un pantin désarticulé se cherchant en vain un destin collectif. Privée de repères, sa défense donnait des signes inquiétants de faiblesse avant qu’elle ne retrouve un semblant de solidité à trois journées du terme. Enfin disposés dans un système immuable, les Turques ne concèdent qu’un but et enregistrent par la même trois victoires de rang face aux Pays-Bas, à la République Tchèque et l’Islande.
Surtout, un coup franc de Selcuk Inan à la 89e minute lors de l’ultime journée leur permet même de chiper la troisième place à la Hongrie. Validant les options tactiques de l’ancien entraîneur du Milan et de la Fio qui n’aura eu de cesse de prôner un jeu tourné vers l’avant, mêlant don de soi et agressivité mais manquant parfois d’équilibre. Un vrai paradoxe pour une équipe dont le milieu à trois, composé d’Inan (Galatasaray), Arda Turan (FC Barcelone) et Hakan Calhnaoglu (Bayer Leverkusen), est la force majeure. Généreuse, imprévisible, sanguine, elle est sans surprise à l’image de son coach. Pas sûr que le couple ne fasse des étincelles cependant.
JULIEN ROUX
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