LE Fait marquant : Sagnol ou la leçon de l’ « entraîneur typique

L’ « entraîneur typique » de Ligue 1 serait-il un pleurnichard doublé d’un grand sens de la manipulation ? La question mérite d’être sérieusement posée. On espère simplement que la confrérie des coachs ne saisira pas SOS Racisme ou la LICRA pour dénoncer une quelconque discrimination. Pour éviter toute confusion et interprétation maladroite, il est bon ici de rappeler les propos de Willy Sagnol. Répondant aux questions de lecteurs de Sud Ouest, l’entraîneur bordelais a dressé le portrait d’un joueur « typique africain » alors qu’il pestait devant la désertion annoncée de certains d’entre eux en janvier pour la CAN : «Tant que je serai entraîneur des Girondins, beaucoup moins de joueurs africains rejoindront le club, je n'ai pas envie de me retrouver tous les deux ans avec 12 joueurs susceptibles d'être absents à cette période.» Précisant sa pensée, il a développé son argumentaire : « L'avantage du joueur, je dirai typique africain : il n'est pas cher, généralement prêt au combat, on peut le qualifier de puissant sur un terrain. Mais le foot, ce n'est pas que ça, c'est aussi de la technique, de l'intelligence, de la discipline. Il faut de tout. Il faut des Nordiques aussi. C'est bien les Nordiques, ils ont une bonne mentalité. Une équipe de foot, c'est un mélange. C'est comme la vie, c'est comme la France. Sur un terrain, on a des défenseurs, des attaquants, des milieux, des grands, des rapides, des petits, des techniques. Voilà. »

Franchement se livrer à une telle diatribe avant d’affronter un homologue métisse a quelque chose de culotté. Le faire alors que son équipe balbutie quelque peu après avoir réalisé une entame de championnat convaincante revêt presque un caractère fascinant. Car voilà en s’emparant de ses habits de pyromane, Willy Sagnol a surtout intenté d’allumer un contre-feu pour protéger les siens des critiques qui commençaient à s’abattre sur eux. Pour les réveiller, il a alors ressorti le bon vieux coup de la piqûre. Visiblement son message a été entendu… Par le monde du foot (et bien plus dans ces cas-là) tout d’abord toujours prêt à s’enflammer à l’idée d’une nouvelle polémique. Et par ses joueurs surtout. Après une poignée de main sans rancune avec Antoine Kombouaré, Sagnol regagnait son banc. Tête baissée, il savait déjà que son coup médiatique avait libéré le feu chez ses hommes. Leur regard disait tout. Il allait embraser les Sang et Or en moins d’une demi-heure. Le temps pour le Tunisien, Wahbi Khazri, d’ouvrir le score d’une délicieuse frappe enveloppée à l’entrée de la surface puis pour le Malien, Cheik Diabaté, de doubler la mise après avoir conclu de près une offrande de… Khazri.

Quel talent ! Le coup était parfait. Il ne restait plus qu’à l’envelopper d’une pointe de dramaturgie. Son grand attaquant désarticulé allait s’en charger. Porté par la joie de son but, après une longue période de mutisme, Diabaté, accompagné dans sa course par plusieurs de ses coéquipiers, s’en allait directement remercier son coach. Du grand art. Beaucoup s’empressaient déjà de pointer le message de soutien adressé par le vestiaire bordelais au garant de son unité. Personne n’osait, en revanche, soutenir l’idée d’un machiavélisme jusqu’au-boutiste. Il faut dire que les larmes de Sagnol, prostré sur son banc, submergé par l’émotion après avoir vu son plan prendre vie sous ses yeux, avaient de quoi en aveugler plus d’un. Ils devraient tout de même jeter un oeil à la défense de l’accusé : « Quand je parle d’un Africain puissant en manque d’intelligence tactique, pas forcément discipliné ni concentré, ça provoque un tôlé. Je vais vous lire un blog qui date de mai 2012… »  L’auteur était Patrick Mboma. Le redresseur de tort, incarné par Lilian Thuram, serait-il donc un « con typique » ?