LE Joueur : Tallo, le banni revit !

Et si sa mise au ban avait précipité l’éviction de son désormais ex-coach du banc bastiais. La remarque est un brin provocatrice. Mais les événements drapent le licenciement de Claude Makelele d’un cynisme impitoyable. Rappelant que le métier d’un entraîneur ne laisse guère de place aux sentiments. Et qu’il est bon, en ce costume, de manier l’ironie avec grand soin. Petit flashback. Quelques semaines en arrière, l’ancien adjoint de Laurent Blanc à Paris avait peu goûté l’investissement de Junior Tallo lors des séances d’entraînement. Il lui avait alors clairement signifié qu’il ne comptait plus sur lui. Une décision qui faisait également suite à une sortie médiatique pour le moins maladroite de l’Ivoirien. Au soir d’une nouvelle défaite des Corses face à Lorient à Furiani, il jugeait que son équipe « n’a pas de Cristiano Ronaldo dans l’effectif, [que] personne n’est au-dessus du lot. Sinon on jouerait ailleurs. Aujourd’hui, si on joue à Bastia, c’est qu’on a le niveau de Bastia ». Ses coéquipiers avaient dû apprécier…

Sans doute l’ont-ils trouvé bien plus inspiré devant les buts montpelliérains que devant les caméras. De retour dans le groupe après que l’intérim de Ghislain Printant et d’Hervé Sekli ait été prolongé, Antonetti ayant refusé la proposition des dirigeants bastiais, l’avant-centre s’est rappelé aux bons souvenirs de son ancien entraîneur. Il faut dire que le banni a enfilé le costume de sauveur. Et permis à sa formation de l’emporter pour la première fois sur ses terres depuis la venue de Toulouse le 23 août dernier. Une éternité. Qui avait eu raison de la clémence du président Geronimi à l’égard de l’ancien numéro 6 de l’équipe de France. Un succès, le second en dix journées, qui doit pour beaucoup à la renaissance de Junior Tallo. Auteur d’un doublé sur ses seules deux seules frappes du match, il a retrouvé les terrains en même temps qu’il a retrouvé l’efficacité. Un sens du but qu’il avait déjà trimballé avec une certaine consistance la saison dernière à quelques kilomètres de là.

Prêté par l’AS Rome à l’AC Ajaccio, il avait réalisé un exercice probant au cœur d’une équipe pourtant à la dérive. Auteur de huit réalisations en vingt-trois apparitions, il avait fait apprécier ses qualités de puissance et d’adresse devant le but. Son doublé plein de finesse et de culot face à Lille la saison dernière avait fini de convaincre les observateurs de Ligue 1 de son talent. Et notamment… Claude Makelele de le rapatrier à Bastia et d’en faire l’un de ses paris. Persuadé de son potentiel et de sa capacité à polir ce diamant brut, il pensait alors avoir réalisé une excellente affaire (encore prêté par le club de Rudi Garcia). Après le match de samedi soir, il a certainement dû se dire qu’il ne s’était pas totalement trompé... Son erreur aura été de ne pas avoir trouvé les mots pour participer à son éclosion. Printant, à l’inverse, y est parvenu… L’histoire ne dit pas en revanche si Makelele aura vécu cela comme une humiliation ou une leçon d’humilité.