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J16/J17 : LE Joueur
J16/J17 : LE Joueur

Cheick Diabaté

Les moqueries se font de plus en plus rares. La tendance n’a pourtant pas totalement dissipé le scepticisme entourant le style, sur et en dehors du terrain, de Cheick Diabaté. René Girard, sans doute un brin amer, commentait la réalisation du Girondin, unique buteur lors de la victoire bordelaise aux dépens de Lille il y a une semaine, d’un méprisant « c’est de la chance ».  Le soir même, Olivier Rouyer et Daniel Bravo s’étonnaient encore, sur le plateau du CFC, de son efficacité. « Diabaté, quand tu le vois courir, tu as toujours l’impression que son genou va lâcher. On dirait un héron ou un échassier. Mais quand il a le ballon dans les pieds, il n’est pas si mauvais que cela. » (Rouyer) ; « Il y a des joueurs grands mais qui sont bien coordonnés. Lui, on a l’impression qu’il a les jambes trop grandes. Donc, quand il joue, on a l’impression qu’il est un peu gêné, mais il met de beaux buts. »

Au point que l’on évoque aujourd’hui une forme de Diabaté-dépendance dans les couloirs du Haillan. Car voilà, lorsqu’il n’a pas débuté une rencontre dans la peau d’un titulaire, Bordeaux n’a jamais gagné lors des 16 premières journées. La statistique en a fait rire plus d'un dans un sourire en forme d'inquiétude. Diabaté s’est néanmoins chargé de faire taire les moqueurs. Le débat sur son omniprésence a donc pris un peu plus d’épaisseur à la suite de sa performance face à Lorient. Préservé par Willy Sagnol en raison d’un genou récalcitrant, le Malien a dû attendre la dernière demi-heure pour faire son apparition. Et l’on mois que l’on puisse dire, c’est que son entrée en jeu a métamorphosé son équipe et changé la face du match. En l’espace de six minutes, il a, tout d’abord, permis à sa formation de recoller en reprenant de la tête un centre de Touré, puis de mener au score en plaçant un intérieur du pied droit hors de portée de Lecomte sur une passe de Khazri.

Une efficacité qui fait même du Bordelais le dixième meilleur buteur du championnat en activité (40 au total). Une réussite à laquelle il s’attendait. A quelques jours de la reprise du championnat face aux Monégasques, il semblait ainsi trimballer une confiance en soi à faire pâlir une ribambelle d’énarques. « Je veux toujours plus… lâchait-il. Il va falloir que je fasse beaucoup d’efforts pour donner tout ce que je peux, parce que Bordeaux mérite ça. Mais je n’ai pas de limite, je n’ai pas peur et j’ai confiance. (…) Je ne passe pas mon message qu’à Monaco, mais au le monde entier, partout, voilà ! Cheick est là, bien sûr, et il n’a pas peur… Il ne connaît pas ça ! Non, Cheick Diabaté, il ne connaît pas la pression ! Vous ne me croyez pas, ou quoi ? J’ai un objectif pas de limite (sic), soit celui d’aller le plus haut possible. » Notamment celui d’améliorer son ratio buts/temps de jeu.

Lors de la saison 2012/13, il tournait à un but toutes les 121 minutes toutes compétitions confondues (18 buts). L’an passé, il affichait une moyenne d’un but toutes les 141 minutes en championnat (12 buts). Cette fois-ci, il n’a besoin « que » de 110 minutes pour trouver le chemin des filets en Ligue 1 (8 buts jusqu’ici). Des chiffres qui cadrent mal pourtant avec l’étiquette qu’on lui avait affublée à ses débuts. Après un prêt prometteur à Ajaccio en L2 puis une saison blanche à Nancy, le Malien, arrivé à l’âge de 17 ans Aquitaine en provenance du centre Salif Keita de Bamako, promenait alors sa grande carcasse désarticulée avec difficulté et donnait parfois l’impression d’errer sur le terrain. Sa technique frustre posait également des questions sur sa faculté à s’imposer à la pointe de l’attaque girondine. Et tendait à définir un cercle d’action circonscrit à la surface de réparation où sa force athlétique (1m94) pourrait dévier quelques ballons précieux.

Donnant alors l’idée d’un jeu bien trop stéréotypé pour espérer prendre à défaut les défenses adverses. D’autant que sa maladresse devant les cages était régulièrement pointée du doigt. Tout sauf donc le portrait-robot d'une machine à marquer. Force est de constater que sa marge de progression était importante. Le changement ne date pas d’hier, mais l’arrivée de Willy Sagnol en Gironde a élargi dans des proportions inespérées son rayon d’expression. Le technicien a ainsi avant tout cherché à le mettre dans les meilleures conditions en l’entourant de joueurs rapides et fins techniquement afin de tirer la quintessence de son style si atypique. Et le résultat est saisissant. Désormais, Diabaté ne se contente plus d’être à la conclusion des mouvements bordelais, à l’inverse il participe de plus en plus à leur élaboration.

Ses coéquipiers, Grégory Sertic en tête, ont été les témoins privilégiés de cette prise de conscience collective et individuelle : « Retrouver Cheick nous fait beaucoup de bien car il pèse sur les défenses, souligne le vice-capitaine de Bordeaux. Il broie les défenseurs. Il les fatigue. Il fait des gestes techniques à l’entraînement que peu font. Il défend beaucoup plus et on voit qu’il est à 100% derrière l’équipe. Je suis fier car il est beaucoup critiqué mais on se rend compte que c’est un des meilleurs attaquants du championnat. » Pas sûr que cet avis ne fasse l’unanimité. Le principal intéressé en fait peu de cas : « C’est facile de se moquer. Pourtant, j’ai toujours marqué. Depuis que je suis à Bordeaux, je n’ai jamais vu un attaquant qui fasse aussi bien que moi. Mais je n’attache aucune importance aux moqueries. » Certains, à n'en pas douter, s'en donneront encore à coeur joie. A moins que...

JULIEN ROUX

2014-12-10 02:12:13
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