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J20 : LE Fait Marquant
J20 : LE Fait Marquant

Cette chère CAN qui emmerderait...

Et si le Racing Club de Lens avait définitivement tourné le dos à son histoire ? Après avoir cédé aux vertiges de l’or noir, il a fini pas se couper également de ses racines en n’envoyant aucune de ses gueules noires disputait la Coupe d’Afrique des Nations. Au regard de son histoire, cela s’apparente à une anomalie en forme de trahison. Gervais Martel, le président des Sang et Or, se rappelle : « Il y a quelques années de cela, on avait joué un match à Marseille alors que huit de nos joueurs étaient partis à la CAN. En 2002, on perd peut-être le titre au profit de Lyon en raison de l’absence d’El-Hadji Diouf. Il était revenu à Lens avec deux semaines de retard. » Par la volonté présidentielle, le contingent s’est donc depuis réduit. Drastiquement.

Son entraîneur, le seul technicien de couleur sur un banc de Ligue 1, a fait sienne la parole de sa hiérarchie. Ce qui ne fut pas vraiment du goût de Yohan Touzghar. L’attaquant lensois qui avait été appelé par la fédération tunisienne n’a eu d’autre choix que de décliner la sélection : « Il m'a dit clairement qu'il avait fait exprès de me boycotter pour que je n'aille pas à la CAN. Pour moi, c'est une grosse trahison. On te dit que si tu y vas, tu es menacé pour la suite, je ne comprends pas. » Réponse du Kanak : « Je suis serein. J'ai le défaut d'être honnête. Lui sort une phrase du contexte. Là, il n'a qu'une envie : partir. Il va donc trouver tous les problèmes de la terre. »

Un imbroglio qui fait écho à la sortie quelque peu malencontreuse de Willy Sagnol en octobre dernier. « Une certitude, tant que je serai entraîneur des Girondins, beaucoup moins de joueurs africains rejoindront le club, soulignait-il. Je n’ai pas envie de me retrouver, tous les deux ans, avec douze joueurs susceptibles d’être absents à cette période. » Si ses propos avaient déclenché une polémique alimentée par certains feignant d’être choqués, ils traduisaient un sentiment partagé par bon nombre d’acteurs du football français.

Pourtant, le phénomène n’est pas récent et ressurgit même avec force tous les deux ans alors que le continent africain partage une fièvre et une excitation sans commune mesure. Ce qui ne manque pas de provoquer quelques maux de tête de l’autre côté de la Méditerranée. D’autant que le nombre de joueurs africains concernés par l’évènement et évoluant en Ligue 1 ne cesse d’augmenter ces dernières années. Alors qu’ils n’étaient « que » 40  et 50 à participer aux deux éditions précédentes, ils sont cette fois-ci 53 à avoir regagné la Guinée Equatoriale.

Un chiffre qui aurait pu être encore bien plus conséquent si plusieurs éléments n’avaient pas été victime d’une blessure (Fakhreddine Ben Youssef de Metz) ou n’avaient pas refusé l’appel de leurs sélections nationales respectives. Par considération de santé publique liée au virus Ebola comme Vincent Enyeama (tenant du titre avec le Nigéria). Par choix de carrière à l’image de Cheick Diabaté qui a préféré subir une opération au lieu de vivre l’aventure avec l’équipe nationale de Mali. Ou par peur d’être borduré à son retour en club à l’instar des Marseillais Brice Dja Djédjé et Mario Lemina ou encore de Bouna Sarr (Metz) et d’Aleadinne Yahia (Caen).

Il faut dire que les clubs de l’élite semblent, bien malgré eux, être frappés de curieux trous mémoriels à l’heure d’évoquer la performance de leurs joueurs canables. Prenez ainsi le cas de Max-Alain Gradel. L’ailier stéphanois, dont l’arrivée dans le Forez a été notamment actée à la suite de ses performances avec les Eléphants, a eu le plaisir de découvrir un commentaire peu flatteur de son entraîneur quelques jours avant le début de la compétition : « Max s'est fait mal derrière une cuisse à la suite d'un sprint lors d'un entraînement, a rappelé l’air de rien le coach des Verts. Il s'est déplacé en Côte d'Ivoire sans les résultats des examens passés ici. J'ose espérer qu'il ne va pas aggraver sa blessure constatée il y a quelques jours. Il prend ses responsabilités, point. Je rappellerais  simplement à Max qu'il était revenu il y a deux ans avec une blessure à un genou qui était soi-disant "rien" mais pour laquelle une opération a été rendue nécessaire… »

Si les dirigeants français, à la différence de leurs homologues britanniques, n’usent que très ponctuellement d’intimidations et de menaces de punition prolongée à l’égard des joueurs participant à la CAN, ils font parfois preuve d’un dédain voire d’un mépris qui ne colle que très mal avec leur politique de recrutement. Bien évidemment, payer un joueur alors qu’il ne peut prétendre évoluer avec vous pour une durée minimum d’un mois tous les deux ans est un obstacle majeur. Pourtant, celui-ci ne freine pas les recruteurs à converger avec appétit vers le pays organisateur de la Coupe d’Afrique dans l’espoir d’attirer un ou deux nouveaux éléments.

Car voilà, comme le rappelait sans emphase Sagnol, le joueur africain est habituellement « pas cher, prêt au combat et puissant sur le terrain ». Quid dès lors de l’argument de la CAN ?  Quid aussi de l’exploration de filières étrangères encore sous exploitées (pays nordiques, pays d’Europe centrale, continent asiatique…) ? Quid, enfin et surtout, de l’incorporation d’éléments peu utilisés ou issus du centre de formation durant la durée du tournoi ? A Auxerre, du temps où Guy Roux officiait encore, une règle tacite visant à limiter le nombre de joueurs africains potentiellement sélectionnables au sein de son effectif avait été mise en place afin de ne pas voir ce dernier être décimé.

Récemmen, René Girard n’avait, lui, pas hésité à changer d’organisation et à offrir une place de titulaire à Stambouli et Cabella afin de pallier les absences de Saihi, Belhanda, El Kaoutari. Un choix qui n’avait pas empêché Montpellier de décrocher son unique titre de champion de France aux dépens du Paris Saint-Germain... Alors oui, le visage de la Ligue 1 au cours des mois de janvier et février (5 journées de L1, 2 tours de Coupe de France et 1 de Coupe de la Ligue) va subir un lifting important dont les nouveaux traits vont très certainement influer sur la course au titre ou sur celle consistant à éviter à la relégation. Mais il serait, en revanche, pour le moins maladroit d’en écrire l’histoire des conséquences à l’aune de la seule Coupe d’Afrique des Nations.

JULIEN ROUX

2015-01-12 13:43:05
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