Anthony Lopes

Impossible d’évoquer la réussite lyonnaise sans mentionner son centre de formation, et sa capacité à se réinventer. Ce dernier s’est ainsi construit au fil des générations une image de machine à façonner des attaquants d’exception. Telle une marque de fabrique qu’il ne cesse d’exhiber en gage de qualité. La dernière collection n’a d’ailleurs pas fait mentir sa réputation. Tout au contraire, elle présente un éventail de choix jamais proposé. Du buteur racé scorant dans toutes les positions à l’altruiste à la patte gauche délicieuse en passant par le feu-follet aux crochets dévastateurs. Il y en a pour tous les goûts.

D’autant que la maison mère a su également élargir son offre. Signe d’une constante recherche à innover, elle aligne aujourd’hui pas moins de huit produits issus directement de son académie parmi son onze titulaire. Comme si son savoir-faire avait su évoluer pour s’adapter aux restrictions économiques en vigueur et diversifier ses créations. L’une d’elles à émerger au poste de gardien de but. Et porte le nom d’Anthony Lopes. Sa performance haut de gamme face au PSG en a de nouveau apporté la confirmation, il n’en finit plus de s’installer parmi les pièces majeures de l’OL collection 2014-2015. Ce que n’avait pas forcément laissé présager sa première titularisation.

Ce 31 octobre 2012, le natif de Givors s’était totalement noyé sous la pluie battante niçoise concédant 3 buts en l’espace de 9 minutes. Résultat, Lyon avait été sorti de la Coupe de la Ligue. Et on ne l’avait plus revu. « Il avait été écarté par Claude Puel, précise Gilles Rousset, l’actuel entraîneur adjoint de la réserve. Or, pour un gardien, la compétition, c’est essentiel. » Il la découvrira dans la peau d’un titulaire sous les ordres de Rémy Garde. Qui tranche en sa faveur en dépit de la concurrence de Rémy Vercoutre.

« Il fait partie de ces jeunes qui ont compris très vite les exigences du métier de footballeur de très haut niveau, relève à l’époque l’entraîneur de l’OL pour justifier son choix. J'apprécie notamment sa capacité à se remettre en cause et à gérer les moments difficiles dans une rencontre. Je suis très content pour lui car il n'a pas connu que des moments faciles, notamment des blessures. » Celle qui subit aux vertèbres à la suite d’un choc aérien l’éloigne des terrains pendant près de deux mois la saison dernière. Elle brise notamment ses rêves de Coupe du Monde avec le… Portugal.

Très vite, en effet, Lopes a décidé d’opter pour la sélection lusitanienne. Avec laquelle il a notamment disputé plusieurs compétitions internationales avec les jeunes. « Je baigne dans la culture portugaise depuis tout petit, raconte-t-il. Quand il y avait l’Euro ou le Mondial, la question ne se posait même pas, c'était le Portugal. Dès que ma famille avait assez d'argent, on partait là-bas l'été. Je passais souvent un mois dans le nord, vers la frontière espagnole, avec mes grands-parents, puis mes parents nous rejoignaient et on partait vers Barcelos, à proximité de Porto. » Des allers-retours fréquents qui lui permettent notamment de se familiariser avec la langue.

Cela se révélera un atout précieux lors de sa première convocation avec les A. Alors attablé avec Cristiano Ronaldo, Coentrao et Pepe, le jeune Lopes se lance dans un discours mêlant finesse et subtilité lui permettant de se dérober malicieusement au moment de la traditionnelle chanson de bizutage. Une maturité qu’il a acquise à mesure qu’il enchaînait les séances spécifiques avec Joël Bats. « Comme tous ceux passés avec lui, il bénéficie d'un entraîneur exceptionnel, insiste Rémi Garde. Ses progrès ne sortent pas d'une pochette surprise mais du travail qu'il fournit et qui lui est proposé par Joël : un travail technique, une approche psychologique des matches et de la carrière. »

Ce que ne manque pas de souligner le gardien lyonnais. « Jo, c’est un dieu pour nous. Les entraînements qu’il me prépare la semaine sont extraordinaires. Avec son expérience, tout ce qu’il me montre se reproduit en match. Il a une grande part de responsabilité dans ma progression et mon début de carrière. Je vais toujours le remercier à la fin du match parce que c’est grâce à lui tout ce qui m’arrive à l’heure actuelle. » En particulier le fait d’être, après 24 journées de championnat, le portier le plus efficace de Ligue 1 avec un pourcentage d’arrêts de 84% (voir ci-dessous).

Contre le champion en titre, l’international portugais a écœuré les parisiens. Multipliant les réflexes et les prouesses pour repousser toutes leurs tentatives. Ou presque. Zlatan Ibrahimovic ayant permis à son équipe d’égaliser après avoir transformé un pénalty… que Lopes avait dans un premier temps arrêté avant que l’arbitre ne le refasse tirer. Rageant pour ce dernier qui n’avait plus encaissé le moindre but en L1 depuis 635 minutes.

Une frustration démultipliée car elle le prive également, et pour deux petites minutes seulement, d’un record pas si anodin que cela. Celui d’invincibilité établi par un gardien lyonnais en championnat. Et détenu jusque-là par Grégory Coupet. Pas avare en louanges au moment d’évoquer son héritier. « J'aime beaucoup sa façon de jouer, de lire les trajectoires relève celui qui fut septuple champion de France avec l’OL. Je me reconnais un petit peu en lui. C'est un vrai-faux débat de dire qu'il manque de taille (1m84) ! C'est le seul gardien que j'ai vu aller chercher des ballons sur la tête de Zlatan. Il a les cannes, l'envie et cette capacité d'avancer. » Pas de doute, la relève est assurée.

 
JULIEN ROUX

Top 10 des gardiens de L1

1. Anthony Lopes (Lyon) 84% d’arrêts (95 arrêts sur 113 tirs cadrés)
2. Geoffrey Jourdren (Montpellier) 83% (84/101)
3. Stéphane Ruffier (Saint-Etienne) 81.2% (78/96)
4. Rémy Riou (Nantes) 81% (77/95)
5. Vincent Enyeama (Lille) 79.8% (83/104)
6. Salvatore Sirigu (Paris SG) 79.4% (62/78)
7. Benjamin Lecomte (Lorient) 79% (123/156)
8. Daniel Subasic (Monaco) 78.9% (71/90)
9. Alphonse Aréola (Bastia) 78.6% (96/122)
10. Steve Mandanda (Marseille) 75.5% (71/94)