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NOUVELLES SPORTS - LIGUE 1
J25 : LE Joueur
J25 : LE Joueur

Mathieu Duhamel

La démarche est un brin maladroite. Voire nonchalante. Le regard fuyant. Presque perdu. Téléphone vissé à l’oreille, Mathieu Duhamel erre sur le parking du stade Michel D’Ornano. La pluie capricieuse tord son visage et laisse deviner des traits fatigués. Trahissant même une certaine lassitude. Le Caennais n’en demeure pas moins imperturbable. Sans doute s’imagine-t-il déjà loin de la Normandie alors que ses futurs ex-coéquipiers s’apprêtent à défier Saint-Etienne dans l’espoir de donner un peu plus d’épaisseur à leur quête du maintien. Pas vraiment sa priorité. A quelques heures de la fermeture du mercato d’hiver, son départ semble inéluctable.

Sa présence en civil à l’approche du coup d’envoi ne renvoie pas d’autre signal. Pourtant, la tendance qu’il dessinait au début de la semaine était toute autre. La raison ? La possible destination de Duhamel. « Evian est un concurrent direct pour le maintien et il va falloir quand même qu'il ait quelques arguments », confiait alors le directeur sportif du Stade Malherbe, Alain Cavéglia. Les lignes ont depuis changé. Et les positions se sont rapprochées. Notamment parce que celles de… Nancy se sont figées. Les dirigeants lorrains ont en effet opposé une fin de non recevoir aux velléités caennaises de recruter Lossemy Karaboué.

Devant l’urgence d’apporter de la variété à son animation offensive, le staff malherbiste a revu ses prétentions et dès lors jeté son dévolu sur Nicolas Benezet, frappé d’un spleen profond du côté… d’Evian. De quoi fournir aux dirigeants haut-savoyards un « argument » séduisant pour finaliser la venue de Duhamel. D’autant que l’attitude de ce dernier avait déjà quelque peu incité leurs homologues normands à se montrer moins gourmands. « La règle est claire : chaque joueur doit faire passer au second plan ses intérêts personnels, et tout donner pour le collectif », rappelait Xavier Gravelaine, le directeur du Stade Malherbe.

Des propos sibyllins en forme de justification à la non-présence de Duhamel dans le onze titulaire de Patrice Garande ces dernières semaines. Une véritable anomalie au regard des performances de l’avant-centre depuis son arrivée dans le Calvados. De fait, il affichait jusque-là le deuxième meilleur ratio de buts par match de l’histoire du club (derrière Franck Priou). Une issue logique cependant au regard de ses dernières prestations. Profondément meurtri par le décès de sa belle-mère, Duhamel trainait son chagrin sur le terrain. Et son mal-être était devenu communicatif. Dans le vestiaire, ses états d’âme ne trouvaient plus un écho favorable. Son entraîneur, qui l’avait longtemps protégé, a lui aussi fini par se lasser. Et se détourner d’un joueur qu’il avait fait mûrir.

« Quand je suis arrivé à Caen, je me souviens que la première chose que j’ai faite, c’était de regarder des vidéos de Patrice Garande sur Internet, confie Duhamel. Il m’a apporté son sens du but. Peut-être que je l’avais déjà un peu au fond de moi mais lui m’a permis d’en prendre conscience. Un jour, on a fait un spécifique tous les deux avec le gardien de but, ça m’a énormément aidé. Je m’en souviens encore. J’étais comme un gosse. Quand tu as la chance d’avoir un entraîneur qui a été meilleur buteur de L1, tu es forcément très réceptif. Il m’a notamment conseillé sur les appels de balle, sur les placements et sur l'aspect mental. Il fallait me canaliser. » Et polir un caractère un brin tempétueux.

Endurci par les échecs et freiné les expériences malencontreuses qui ont considérablement ralenti son éclosion au plus haut niveau. A l’image de ce passage à Quevilly où son entraîneur de l’époque (Eric Fouda) le fait évoluer dans le couloir gauche de… la défense. Ou encore lorsqu’il est renvoyé de Clairefontaine. En cause ? Un tempérament en inadéquation avec les exigences de l’institution… Une image d’écorché vif prompt à dégoupiller qui n’a cessé de le poursuivre. Et d’alimenter les préjugés à son encontre. « Philippe Hinschberger (à Laval) pensait que si j'étais remplaçant en L2, je ferais la gueule, se souvient Duhamel. Il a préféré ne pas me garder. » A son arrivée à Troyes, Jean-Marc Furlan partage le même scepticisme.

« Lorsqu'il m'a parlé pour la première fois de la saison, il m'a dit qu'en tant que joueur de National, je ne serais jamais un bon joueur de Ligue 2, poursuit-il. Cela prouve qu'il s'est trompé. J'ai un petit côté "revanchard". J'aime bien montrer à ceux qui n'ont pas cru en moi qu'ils ont eu tort. » Voilà qui ne va pas vraiment rassurer les supporters caennais alors que leur club luttent avec Evian – mais pas que - pour sa survie dans l’élite. Sans doute les décideurs normands ont-ils pris leur précaution en s’assurant que son prêt prévoit une clause l’empêchant de jouer face à son ancien employeur… en clôture de la saison.

Si tel est le cas, on imagine sans mal que Duhamel se nourrira de cet ultime pied de nez, en forme d’affront, pour donner corps aux lettres tatouées sur son avant bras doit : « Ce qui ne me tue pas me rend plus fort ». Le message n’a d’ailleurs pas tardé à se matérialiser. Il a résonné d’un doublé au cœur d’un match aux relents de mort (victoire de l’ETG à Lens, 0-2). Redonnant ainsi vie à un regard qui s’était une nouvelle fois égaré.

JULIEN ROUX   

2015-02-17 13:32:31
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