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J26 : LE Joueur
J26 : LE Joueur

Adrien Rabiot

De son attitude se dégage une forme d’arrogance. De celle qui entremêle la nonchalance à la suffisance. De celle aussi qui renferme une fragile assurance. De celle enfin qui révèle un tiraillement interne, si prégnant à l’adolescence. Quand le gamin découvre la pelouse du Parc des Princes, il n’est alors âgé que de 17 ans. Et déjà sa manière de se déplacer et de caresser le cuir trahissent une maturité précoce. Longiligne et fin techniquement, il donne l’impression de faire corps avec le ballon. Et de danser avec lui pour mieux prendre la mesure de son adversaire.

Un récital, version ballet, face aux stars du Barça, ça ressemble vaguement à de belles promesses. D’autant que le garçon a une gueule d’ange. Un regard bleu azur et une tignasse façon premier de la classe de quoi donner bien des tourments à sa maman. Qui n’est jamais loin de son rejeton. Et veille à son éclosion et à son épanouissement en prenant parfois le contre-pied des us et des coutumes du milieu. Yannick Stopyra, qui a accueilli Adrien Rabiot au pôle Espoirs de Castelmaurou, se souvient : « Elle n'est pas facile en négociations et sait ce qu'elle veut. »

Manchester City, aussi prestigieux et fortuné soit-il, n’a pas échappé à son courroux. Alors que son fils avait un signer un bail de six ans, il ne reste finalement que… six mois. Dans le nord de l’Angleterre, les promesses non tenues ont eu raison de sa patience. En cause ? Un loyer hors de prix, des cours d’anglais interrompus, une maison dont il ne voit pas les clés, et un téléphone coupé. Bref, l’idylle tourne au fiasco. Sur le chemin du retour, le PSG l’oblige à faire une halte sur son trajet jusqu’à Pau. Il signe alors un contrat de non sollicitation de trois ans avec le club de la capitale.

Qui ne le retient pas et joue, à l’inverse, les entremetteurs en favorisant son rapprochement avec Stopyra. « Avec sa mère à ses côtés, Adrien a trouvé un fonctionnement qui lui convient. Pourquoi changer ?, s'interroge-t-il. Je sais que sa mère en dérange certains qui souhaiteraient qu'il coupe le cordon. Sans doute parce qu'on n'est pas habitué à voir une mère s'occuper de la carrière de son fils. » Une attitude hyper protective qui s’explique en partie par le terrible drame qui a frappé la famille Rabiot. Son mari, victime d’un violent AVC et victime du « locked-in syndrome »* est depuis cloué dans un fauteuil.

Conscients du traumatisme généré par cet accident, les dirigeants parisiens réservent un traitement de choix au fils prodige. Aussi organisent-ils une rencontre amicale entre les jeunes du PSG et ceux d’Auxerre afin que son père, hospitalisé en Bourgogne, puisse être présent en tribunes. Une attention qui finit de convaincre Véronique Rabiot. Sans pour autant la réduire au silence. Ses exigences ne cessent de frapper les murs du Camp des Loges. A l’hiver 2012, elle refuse ainsi que le jeune milieu de terrain participe au stage des parisiens à Doha. La raison ? Le PSG ne prenait pas en charge son séjour sur place.

Un an plus tard, elle obtiendra gain de cause. Et son fils s’envolera avec ses partenaires. Une omniprésence qui fait sourire autant qu’elle fait grincer des dents au sein du vestiaire parisien. Ce que ne manque pas de souligner certains acteurs gravitant autour du champion de France en titre. « C’est le stéréotype du parent qui, plein de bonnes intentions, pense gérer la carrière de son enfant mais lui fait plus de mal que de bien », résume un agent. Un des anciens avocats du clan Rabiot confirme : « Je n’ai jamais réussi à m’entretenir directement avec son fils. Elle l’isole pour en conserver la maîtrise. » A l’image de son transfert avorté à Saint-Etienne lors du mercato hivernal 2013 : « Elle se comporte comme ces pères castrateurs avec leurs filles, joueuses de tennis », renchérit-on à l’ASSE.

Un avis partagé par Laurent Blanc, l’entraîneur du PSG, lors de l’intersaison dernière : « Il est possible qu’il nous quitte. Avec Adrien, on a fait beaucoup de choses parce qu’on apprécie le joueur et le garçon. Mais à un moment donné, on ne peut pas aller plus loin. Je pense qu’il a une grande opportunité ici, mais visiblement son entourage n’a pas le même avis et profite de sa situation contractuelle. » Il est vrai qu’à un an du terme de son bail et après une saison accomplie (34 apparitions dont 17 titularisations et 3 buts), Rabiot, âgé de 19 ans, suscite les convoitises. Notamment celles de Rudi Garcia et de la Roma. Qui entrent en relation avec leurs homologues parisiens.

D’abord réticents, ces derniers, lassés par l’intransigeance des prétentions financières de la famille Rabiot, finissent pas entrouvrir la porte à un départ... En clair, sa mère d’agent exige que son garçon touche autant que Lucas Digne qui émarge à 250 000€ par mois. Les deux joueurs ayant, selon elle, un statut similaire d’international Espoirs. Surtout, elle sait que le PSG ne peut se permettre de laisser filer un joueur qu’il a formé après avoir cédé Sakho à Liverpool et Coman à la Juventus. De fait, cela enverrait un signal négatif auprès de ses formateurs et des autres talents en devenir qu’il s’évertue à dénicher.

Cela poserait, surtout, un problème réglementaire auprès de l’UEFA qui impose aux clubs engagés en Ligue des Champions d’inscrire un nombre minimum de joueurs issus de leur académie. Le bras de fer est engagé. Et les décideurs parisiens ne semblent guère enclins à rompre. Ils choisissent ainsi de ne pas retenir Rabiot parmi les éléments susceptibles de disputer la C1 alors que Laurent Blanc est prié de se priver de ses services en championnat en l’envoyant systématiquement en CFA.

« Si on veut me punir, ce n’est pas comme ça qu’il faut faire, parce que moi, venir à l’entraînement, m’entraîner, et jouer même en CFA, je prends du plaisir à faire ça. Ce n’est pas une punition pour moi. » Un brin frustré, il prend également publiquement la défense de sa mère accusée d’avoir fait capoter l’accord entre le PSG et la Roma pour un transfert estimé entre 12 et 15 millions d’euros. « Les gens se trompent totalement quand ils disent qu’elle peut plomber ma carrière, s’agace-t-il. C’est facile de l’attaquer parce que c’est une femme et que dans le milieu du foot ce n’est pas très simple. Si je l’ai choisi comme agent, c’est que j’ai confiance en elle et que c’est la meilleure personne pour me guider. »

Un guide qui lui conseillera, contre toute attente, de prolonger son contrat avec le PSG jusqu’en 2019 en échange d’un salaire brut mensuel de… 250 000€ et d’une prime à la signature de 4M€... Une volte-face qui se lit à l’aune de l’intervention présidentielle déterminante de Nasser Al-Khelaifi. « Il m’a dit que je faisais partie du projet, que j’étais le futur du club, témoigne Rabiot. Cela m’a convaincu de continuer l’aventure. » Et de retrouver le chemin des terrains. Pour claquer un doublé plein de sérénité face au Téfécé.

JULIEN ROUX


* Syndrome d'enfermement : état neurologique rare qui provoque une paralysie complète à l'exception des yeux et des paupières.

2015-02-24 13:48:23
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